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Dictionnaire encyclopédique sanskrit (Védique)

Celui qui s'attelle à la rédaction d'un dictionnaire doit avant tout être conscient de prendre une responsabilité qui le dépasse, celle de décrire aussi exactement que possible une entité matérielle ou conceptuelle en quelques mots. Quelle vanité bien souvent ou quelle perfidie dont certains esprits malicieux se sont emparés volontiers pour influencer leurs congénères. Nul ne niera que Voltaire était de cette espèce et son dictionnaire contribue peu à la culture du philosophe, même si l'acuité de son esprit mérite grand respect. Les mots changent de sens au cours des temps en raison d'un usage détourné de leur sens premier, propagé par ignorance ou encore une fois par malice. La connaissance de l'étymologie des mots dans chaque langue est un outil précieux pour connaître l'idée que se font de quelque objet ou concept les gens éduqués dans cette culture. Ainsi en sanskrit un cheval est un animal qui court vite, qui crie fort, qui a de longs cheveux et qui peut vous porter; à chacune de ces qualités (spécificités - guṇa) correspond un nom différent de la même créature (voir l'entrée aṡva dans les mots communs). L'esprit (au sens de mental – manas en sanskrit) en forme une image (darśana) et prononce un son (śabda) sensé la représenter. Etait-ce Pāṇini, le premier grammairien de l'histoire, ou un autre philosophe de l'époque védique qui a dit ce qui suit? Peu importe. Ce qui importe vraiment est ce qu'il a dit, à savoir que: le son en soi est une définition et lorsqu'on entend le mot go on voit instinctivement une vache. Puissions-nous en arriver enfin à ce stade de notre évolution où on saura enfin ce qu'on dit! En attendant je suis d'opinion que si on comprend le sens des mots on possède l'essentiel de la culture. Il est vain de discuter des Vedas, des Upaniṣads, des Purānas (Rāmayana et Mahābhārata inclus) sans un minimum de connaissance de leur vocabulaire et certains Indiens à la culture limitée se sont chargés dès l'antiquité (comme il se doit en tant qu'utilisateurs) d'en faire mauvais usage. Je ne les dénoncerai pas, même s'ils auraient dû prendre un guru pour leur enseigner la science du vocabulaire, comme le prescrivent d'ailleurs les smṛitis (ce qui reste dans les mémoires des paroles des anciens), afin de savoir de quoi ils parlaient. Certains ont été jusqu'à dire (notamment dans un Upaniṣad) que les prophètes de théories contestables étaient des incarnations de Viṣṇu s'étant fixé pour mission d'induire les démons en erreur. Mais Arjuna n'accuse-t-il pas le plus incontestable de tous les orateurs de l'induire dans l'erreur avec ses mots savants (Gītāsection 3 vers 2)? Cet orateur, Kṛiṣṇa le Maître du yoga lui-même, n'utilise-t-il pas ce même mot (yoga) à plusieurs reprises avec des sens aussi variés que l'annexation d'un bien (shloka 2-45 entre autres), l'attelage à une tâche y compris celle de combattre (shlokas 2.38 et 2.50), le contrôle de l'intelligence par l'âme (shlokas 2.39, 2.49, 2.50….), le désintéressement de s'attribuer personnellement toute activité et son  résultat (shloka 2.48 …), l'implication du  Maître dans son activité imaginative (māya, yoga vibhūti, shloka 10.18 et autres), et même parfois le contrôle de son corps (pranayama, hatha yoga, rāja yoga). Ce sont ces dernières pratiques, qui dans le langage de la Gītā constituent des préliminaires à la méditation et au samādhi, que désigne le mot yoga en cette époque pragmatique qui est la nôtre. On a là un parfait exemple de l'évolution du sens des mots, qu'on peut considérer légitime pour une langue parlée mais qui n'en est pas moins préjudiciable à la compréhension des textes que nous ont légués nos ancêtres.  Le péril d'exprimer des idées avec des mots, qui tendent à exprimer une chose et au deuxième degré son contraire, est parfaitement illustré par l'entrée sama dans le lexique: ce petit mot "même" dans lequel certains lisent égal et d'autres identique. La traduction en langue française est souvent sujette à une erreur d'interprétation, du fait du penchant certain qu'ont les Français pour l'euphémisme et l'antiphrase. On hésite par exemple à traduire les mots dhyāna ou samādhi par   méditation sachant que dans cette langue on parle volontiers de méditer un mauvais coup ou tout autre projet. On hésite aussi à parler d'austérité ou de sacrifice qui sont devenus des mots du language économique (consulter les entrées tapas, yajña et Agni). Quant au mot dharma il est devenu d'usage de dire qu'il est intraduisible, alors que c'est le concept qui définit l'homme par rapport à l'animal: il pense devoir faire des choses parce que c'est bien, bon ou vrai, alors qu'il ne saurait dire exactement ce qu'il entend par là et que c'est contraire à son intérêt personnel (pour en savoir plus long consulter l'entrée dharma du lexique). If faut savoir aussi que le genre des mots en sanskrit n'est pas anodin, il a une portée symbolique indéniable. La science des suffixes et des préfixes pour modifier le sens des mots en le précisant est aussi extraordinairement développée dans cette langue. Pour faire court les mots sanskrits masculins désignent de préférence des principes actifs et les mots féminins des concepts passifs, des réceptacles, comme il se doit dans une culture patriarcale. Lorsqu'il advient qu'un mot comme vāc (parole) soit féminin en sanskrit, étant un pseudonyme de la déesse Sarastvatī, alors que la parole est paradoxalement l'action par excellence (voir la 1ere section du Brihadaryanaka Upanishad), on peut constater que curieusement il se décline comme un mot masculin: vāk vācam vāca vāce vācaḥ vācaḥ vāci. A titre d'exemple de l'utilisation des suffixes, une personne buddhi-vat ou buddhi-mat est dotée de compréhension (buddhi) et si elle est en état de comprendre à un moment donné on dira d'elle qu'elle est buddhi-tva , mais on dira plus simplement qu'elle est  budha s'il s'agit d'un sage qui a pour habitude d'être conscient, de percevoir et reconnaître les choses pour ce qu'elles sont (sens du verbe budh).  La sophistication du langage ne se limite pas à la richesse du vocabulaire et implique entre autres le bon usage des temps et modes des verbes, qui est hors sujet dans un lexique, même si la versatilité du sanskrit dans ce domaine est encore une fois impressionnante : je n'en donnerai qu'un exemple sous l'entrée ātmanepada. Ce "lexique védique" a été conçu au départ comme un aide mémoire de quelques pages pour faciliter la lecture des œuvres précitées, et j'ai considéré ensuite qu'il pourrait être intéressant de l'étoffer pour en faire une encyclopédie simplifiée pour ceux qui n'ont ni le goût ni le temps disponible pour lire les 108 Upaniṣads, 18 Mahā Purānas, 18 livres du Mahā Bhārata et autres monuments littéraires en langue sanskrite. A mon opinion quiconque entreprend la lecture d'une de ces œuvres sans quelque notion du vocabulaire risque fort de faire des rapprochements inappropriés avec des concepts étrangers à la culture sanskrite, l'erreur la plus typique est la "christianisation" des concepts moraux et comportementaux. En résumé, un langage n'est pas un simple code qu'on peut remplacer aisément par  un autre mais une manière de percevoir l'existence; le connaître c'est comprendre la culture qui l'a conçu. A propos d'existence, il est fortement conseillé de commencer par lire ce qui est écrit sous l'entrée "as" du lexique.   
Pour faciliter la compréhension des mots, les liaisons phonétiques (saṁdhi) et déclinaisons grammaticales sont volontairement omises dans les explications linguistiques entre parenthèses. La logique ne coïncide pas forcément avec la simplicité. On dit d'ailleurs que le chemin le plus court en Inde n'est pas la ligne droite. Or il n'y a pas à ma connaissance de texte sanskrit  qui n'implique pas la religion si ce n'en est pas le sujet principal, comme il n'y a pas de rue en Inde sans un temple, de maison sans au moins une "photo de Dieu", de chanson ou de film qui ne l'évoque pas. Sinon pour mieux comprendre l'Hindi et dialectes dérivés, ainsi que nombre de racines des mots français ou anglais, on s'intéresse au sanskrit pour lire des textes parlant principalement de religion, Mahābhārata inclus. Aussi ne saurai-je commencer ce lexique par un autre sujet que les noms du Seigneur, qui donnent un aperçu immédiat de la façon dont la personne qui en parle conçoit sa propre existence et l'univers qui l'entoure. Je poursuivrai avec l'identité des personnes qui sont souvent impliquées dans les récits et pour finir je définirai les noms communs les plus utiles. Je développerai de préférence l'explication de ceux qui font l'objet de textes philosophiques. Cette procédure devrait permettre de limiter les répétitions, en renvoyant pour une explication plus détaillée des noms propres à une liste de mots communs qui suit. La transcription des 2 lettres sifflantes ṡ (ou ś) et ṣ(ou ş) qui sont toutes deux prononcées sh avec une différence inaudible pour une oreille européenne, des 4 rétroflexes ṭ, ṭh, ḍ et ḍh prononcées avec la langue touchant "le crâne" à l'avant du palais juste derrière la machoire, des 4 nasales ṅ, ñ, ṇ, n selon la position de la langue, sans compter la demi nasale  ṁ (ou ṃ appelée anusvāra) qui en toute rigueur a plusieurs variantes pour un lettré en sanskrit, n'a pas été respecté systématiquement. La voyelle ṛi est presque toujours transcrite avec 2 caractères latins bien qu'un seul suffirait, ceci afin qu'elle soit bien perçue comme une voyelle lorsqu'on sépare les syllabes d'un vers: par exemple le nom Kṛiṣṇa a 2 syllabes parce qu'il y a 2 voyelles. Et puisqu'il est question de transcription correcte celle du nom du language dont on parle est saṃskṛita (mot du genre neutre s'écrivant au nominatif saṃskṛitam), formé du préfix sam ۭ signifiant ensemble ou totalement et du verbe le plus utilisé du dictionnaire, kṛi , signifiant faire: le sanskrit est le language bien fait, complet, rafiné. Pour en revenir aux voyelles, ce sont elles qui constituent le corps du son, venu du fond de la cage thoracique; les consonnes lui donnent une structure, un squelette au moyen de la langue et des cordes vocales. La voyelle a courte ne s'écrit pas en sanskrit sauf si elle constitue une syllabe en elle-même (comme dans a-nu-svā-ra) et en fait on devrait la transcrire sous la forme d'un e court en français car c'est ainsi qu'elle est bien souvent à-demi prononcée (comme un e muet). Mais sa prononciation varie selon l'accent local et il y a des exceptions notables: Kṛiṣṇa en est une. Il est important d'écrire cette voyelle a dans une transcription en caractères latins pour bien reconnaitre les consonnes qui sont "conjuguées" (comme ṣṇ dans Kṛiṣṇa ou sv dans svā) pour ne former qu'un son. En sanskrit c'est avant tout le son qui compte. N'oublions pas qu'on l'a parlé pendant des milliers d'années sans l'écrire.
Une dernière note concernant l'ordre alphabétique: j'ai utilisé l'ordre français mais il est toujours délicat de décider s'il convient de séparer les mots en ṛi des mots comportant les syllabes ra, re, ri, ro, ru, du fait que ṛi est une voyelle en sanskrit (et donc se comporte différemment d'une syllabe lorsqu'on fait une liaison phonétique), ou les mots commençant par la syllabe ka de ceux commençant par kā (avant de considérer la consonne qui suit), ou  les mots comportant la consonne dh de ceux comportant les syllabes de et di, etc….